Ara se retourna sur elle-même et vit une chambre plus somptueuse que celle qu'elle avait déjà eue auparavant : un lit en baldaquin se trouvait sur le bord de la fenêtre, et elle avait une vue magnifique sur la forêt et sur le lac. Le lit, moelleux comme de la ouate, lui donnait envie d'y rester toute sa vie. Elle avait même un voile pour masquer sa chambre la nuit. Dans le coin droit de la chambre il y avait une coiffeuse avec plein d'accessoires de maquillage ainsi que d'autres pour les cheveux, puis toutes sortes de bijoux étaient soigneusement rangés par paire dans les tiroirs. Rongée par la curiosité, elle ouvra la garde-robe et faillit s'évanouir de stupeur : toutes sortes de robes, de toutes les couleurs, étaient rangées là. Il y avait des robes aux manches courtes ou longues, aux jupes longues ou courtes, en soie ou en coton, avec des décolletés comme elle n'en avait jamais vus ou avec des bustiers sans décolleté. Voyant la splendeur de ces robes, elle se dit que jamais elle n'oserait en mettre une, mais comme elle n'avait pas emmené de robe convenable pour assister au repas du roi, elle était désespérée. Elle aurait voulu que sa mère soit là à ce moment, elle au moins aurait su laquelle mettre. A l'âge qu'elle avait, être perdue devant des robes était idiot, mais elle voulait de l'aide. Il fallait qu'elle surprenne tout le monde, et surtout Gandalf. Elle s'en voulait un peu de l'austérité dont elle avait fait preuve face à lui tout le long du voyage.

- Ce n'est pas sa faute si mes parents sont morts et qu'il m'a emmenée de places en places sans arrêt.

Mais ce n'était pas le moment de penser à se faire pardonner, il lui fallait trouver de l'aide de suite. Legolas était le plus proche d'elle, mais c'était un peu gênant de lui demander de l'aide à propos de robes...

- Ce n'est probablement pas du tout son domaine, d'ailleurs je me demande quels sont ses domaines. Il a l'air fort et bien bâtit. Et assez beau...

Non, il ne fallait pas encore divaguer. Elle se concentra et décida de trouver une domestique ou même une nourrice. Il devait bien y avoir une nourrice dans un château avec des enfants, non ?

- Est-ce que Legolas a des frères et soeurs ? Non ma vieille, il faut te concentrer pour trouver la nourrice, mais où peut-elle bien être ?

Ara parlait toute seule depuis maintenant cinq minutes lorsqu'elle en vint à l'idée de sortir dans les couloirs du palais chercher cette nourrice. Elle ouvrit la porte, passa la tête par l'ouverture et vit que tout était désert, alors elle marcha vers la salle d'où elle était venue, la salle avec les trônes. Là, le banquet commençait à être installé et un des domestiques l'arrêta.

- Pardonnez-moi, mais aucun membre de la cour n'a le droit de se présenter ici avant la fin des préparatifs.

- Mais je ne fais pas partie de la cour, je suis Ara, je viens d'arriver avec Gandalf, le magicien.

- Mais alors que faites-vous ici, vous devriez être entrain de vous préparer, demoiselle Ara.

- C'est que... je n'arrive pas à choisir comment m'habiller. Je n'ai jamais vu autant de robes, de bijoux, et d'accessoires à ma disposition... dit-elle, embêtée.

- Vous n'avez pas à avoir honte, demoiselle Ara. Retournez dans votre chambre, je vous enverrais quelqu'un pour vous aider à choisir sans tarder.

- Merci, merci pour tout, dit-elle en partant en courrant.

Arrivée dans sa chambre, elle commença à paniquer : qui allait donc venir pour l'aider à s'habiller ? Perdue dans ses pensées, elle n'entendit pas frapper à la porte. Elle paniquait, stressait en se demandant qui allait venir, et la personne à la porte devait avoir perdu patience, car elle décida d'entrer dans la chambre et elle se positionna derrière Ara. Cette dernière marchait de long en large, et la personne la suivait de très près. Arrivée au bout de la chambre, il fallut bien qu'Ara se retourne, et elle fonça dans...

- Mais que faites-vous là ? Partez, j'attends quelqu'un pour m'aider à régler un problème vital.

- Choisir une robe est devenu vital maintenant ? Un domestique a pensé que je serais le mieux qualifié pour t'aider puisque je suis le Prince de ce royaume, et que je connais à la lettre le protocole à suivre lors de pareilles soirées.

- Oh... Je dois vous sembler stupide, une fille, et qui plus est une Princesse, ayant de la difficulté à choisir une robe pour plaire à ses hôtes...

- Premièrement, je ne savais pas qu'on avait recommencé à se vouvoyer, et deuxièmement, même si tu es une princesse, c'est normal que tu ais des difficultés à choisir une robe avec tout ce que tu as vécu. Oui, je suis au courant de tout. Gandalf en a parlé avec mon père, et j'étais présent. Maintenant, est-ce qu'on choisit cette robe oui ou non ? Dit-il en lui relevant le menton.

Avec un sourire reconnaissant, elle se leva, alla devant la garde-robe encore ouverte, et inspecta toutes les robes. Elle en choisit deux : la première était bleue avec de longues manches évasées et transparentes, dont la longue jupe était simple mais belle. La seconde était une robe mauve foncé à bretelles fines, avec une jupe légère et échancrée, paraissant voler, et ses couleurs en dégradé de mauve la mettaient en valeur. Legolas ne regardait même pas les robes, perdu dans ses songes en regardant dehors. Il ne remarqua même pas qu'Ara attendait une réponse impatiemment. Elle commençait vraiment à perdre patience, et elle se fit remarquer par un raclement de gorge.

- Hm hm... Je te dérange peut-être, mais pourrais-tu rester ici avec moi ? J'ai un problème de robe à régler.

Legolas, surpris par son audace et son manque de patience à son égard, tiqua sur sa dernière phrase et s'irrita. Après tout, rien ne l'obligeait à l'aider.

- Je te ferai remarquer que tu n'es pas le centre de l'univers, Ara. Et puis je suis fatigué de t'aider, surtout si tu te comportes ainsi avec moi.

Il se leva et marcha jusqu'à la porte, l'ouvrit et au dernier moment, juste avant de passer le cadre, il se retourna.

- Et la mauve t'irait sûrement le mieux, mais ce n'est que mon avis. On se verra au banquet...

Ara ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Peut-être avait-elle été impolie avec lui, c'est vrai qu'il n'était pas obligé de l'aider, mais elle ne le pensait pas si susceptible. Mais bon, elle ne se laisserait pas démoraliser par un prince arrogant et prétentieux. Mais tout de même, elle ne voulait pas que déjà cela tourne mal ici, et surtout pas avec la seule personne de son âge.

Elle commença à s'habiller, et, n'étant pas habituée à mettre des robes de ce genre, une bataille comme personne n'en a jamais vu débuta, puis on frappa à sa porte.

- Allez-vous en Prince, j'essaie de m'habiller.

Sur ces paroles la porte s'ouvrit, une dame apparu et vit Ara en prise avec sa robe, qu'elle avait au-dessus de sa tête, ses bras étant en l'air. La vue était comique, mais pour ne pas blesser la jeune fille, elle ne fit aucun commentaire et aucune simagrée.

- Peut-être puis-je vous être utile ?

- Oui, assurément, la robe ne veut pas être enfilée par moi.

La dame rit à la remarque, et s'avança vers Ara, puis la libéra. Une fois le champ de bataille calmé, elle l'aida à enfiler sa robe proprement. Ara fut soulagée et se regarda dans le miroir. Elle se trouvait idiote, une jeune fille banale bien que Princesse, habillée avec une robe digne des plus grandes Reines. La dame vit la mine renfrognée de la jeune demoiselle et se sentit mal pour elle.

- Voyons dame Ara, il ne faut pas être ainsi, vous êtes ravissante. Et puis, cette soirée est en votre honneur. Souriez, vous n'êtes pas coiffée et il reste encore quelque chose à mettre, mais je ne pourrais rien faire sans un sourire de votre part.

Ara la regarda, et face à cet enthousiasme elle ne put que sourire. Elle s'assit alors face au miroir de la coiffeuse. La dame s'apprêta à la coiffer de manière elfique, cheveux raides mais bien ordonnés avec des tresses. Chaque tresse avait une place et une signification propre, c'est pour cela qu'aucun elfe n'avait la même coiffure qu'un autre. La dame ouvrit un tiroir et y chercha un collier somptueux sertit de pierre, des améthystes mauves. Le collier était aménagé en trois étages, et il allait très bien avec la robe, se collant parfaitement à la forme d'Ara.

- Voilà, je crois que vous êtes prête pour le banquet. Je vous laisse maintenant, j'ai des enfants à aller voir.

- Attendez, comment avez-vous su que j'avais besoin de vous ?

- Mais le prince Legolas m'a prévenue, il m'a dit qu'il ne pouvait pas vous aider à vous habiller et qu'une femme serait plus utile.

- Merci, pour tout. Vous ne m'avez même pas dit votre nom.

- Maëwa. Je suis nourrice et je m'occupe de l'infirmerie du royaume. Au revoir, dame Ara.

Elle sortit en fermant la porte. Ara, surprise par ce que la nourrice lui avait dit au sujet de Legolas, ne remarqua même pas l'intrus approcher d'elle.

- Je ne le comprendrais jamais, je crois...

- Tu ne comprendras pas quoi, Ara ?

Elle avait parlé à voix haute, se pensant seule. L'intrus, qui n'était autre que Gandalf, la fit sursauter en parlant. Il était venu la chercher et voir si elle était prête. Voyant que tout était fini et qu'elle pouvait se rendre à la soirée, il lui offrit sa main, qu'elle prit aussitôt. En route, il lui demanda ce quelle avait voulu dire plus tôt.

- Alors, tu ne m'as toujours pas répondu, qu'est-ce que tu ne comprendras jamais ?

- Rien Gandalf, rien.

Gandalf ne prêta plus attention à ce sujet, puisqu'ils venaient d'arriver à la salle du banquet. Il y avait beaucoup trop de monde pour Ara, et elle se sentit intimidée. Gandalf, lui, avança à travers cette foule et se rendit face au roi. Le voyant partir, elle courra jusqu'à lui, ne voulant pas le perdre. Les voyant arriver, le roi proclama que le banquet pouvait commencer. De nombreuses tables avaient été mises à la disposition des invités, de somptueux repas avaient été préparés, mais Ara ne mangeait pas grand-chose. Elle avait compris que Gandalf repartirait dès que le souper serait terminé, et elle s'en attristait. De loin, deux yeux fixaient Ara et virent le désarroi qui la rongeait. L'inconnu n'aimait pas ça, et se jura de l'aider de son mieux à surmonter cette épreuve. Le repas terminé, des danses lui succédèrent, mais rien n'attira l'attention d'Ara. Elle ne pensait qu'au départ de Gandalf, pour cette fois-ci ne pas le rater. Une dame vint à sa rencontre pour apprendre à la connaître, et pour ne pas paraître impolie Ara accepta de répondre à toutes ses questions. Elle ne tourna la tête qu'une seconde ou deux, et Gandalf avait déjà disparu. Elle se leva de suite.

- Pardonnez-moi ma dame, mais où se trouvent les écuries ?

La dame lui expliqua comment s'y rendre, alors Ara courut le long du mur de la salle et, sans s'arrêter, elle ouvrit les portes et traversa la grande cour. Les écuries se trouvaient juste devant elle lorsqu'elle entendit Grispoil hennir. Elle augmenta alors sa vitesse et s'arrêta juste à l'entrée du bâtiment, bloquant le passage à Gandalf.

- Pas cette fois, vous ne pouvez partir sans me dire quand vous reviendrez.

- Je ne le sais pas, lorsque le vent me mènera ici.

- Ce n'est pas suffisant, vous êtes tout ce qui me reste.

Quitter la jeune fille lui était douloureux, mais Gandalf demanda en elfique à Grispoil de la contourner et il partit au galop sans se retourner. Ara cria son nom sans réponse. Il était partit, la laissant seule une fois de plus. Au paroxysme de sa tristesse, elle resta là à fixer le vide, là où Gandalf venait de disparaître. Des larmes coulèrent sur ses joues mais elle ne le remarqua même pas. Elle ne vit pas plus une ombre s'approcher et lui poser une main sur son épaule.

- Il reviendra, crois-moi. Il ne t'abandonnera pas, pas cette fois.