Très cher fandom français,

Mon amour pour Keith étant infini (sisi je vous jure c'est vrai), un beau matin en écoutant l'EP Skeletons de Crywolf, j'ai décidé de revenir avec un recueil qui lui sera entièrement dédié.

PETITES PRECISIONS CONCERNANT LA FIC :

- Chaque OS reprendra une chanson dont je m'inspirerai. Je citerai quelques paroles, mais il ne s'agit pas d'une song fic pour autant. Cela dit puisque je m'en suis imprégnée en écrivant, je vous conseille vivement d'écouter les morceaux en lisant. D'ailleurs à vrai dire il s'agit presque plus d'une fanfic à chapitres que d'un recueil puisque les OS vont se suivre, chacun abordant un thème inspiré des paroles des chansons dont j'ai volontairement modifié l'ordre pour instaurer une certaine continuité.

- Les événements imaginés ici se déroulent après la saison 2 et ne prennent pas en compte la saison 3 (qui n'est pas encore arrivée à ce jour) donc SPOIL FINAL DE LA SAISON 2.

- Ca en a peut-être pas l'air dans le premier OS/chapitre, mais il y aura du KLANCE. Désolée pour ceux qui n'aiment pas, j'essaie de trouver comment écrire du Sheith mais très franchement j'ai du mal à les imaginer en couple dans l'univers et même si je ne peux pas nier l'importance que Shiro a pour Keith (toute la fic parlera de ça de toute façon), j'aime trop leur bromance pour en faire quelque chose de romantique. Cela dit si vous êtes fans du couple et que vous avez des headcanons intéressants à partager je suis ouverte à toute suggestion !

Voici le premier OS/chapitre (j'arrive définitivement pas à me décider). Il est ici exclusivement centré sur Keith, la suite comportera bien plus d'interactions avec les autres personnages. Comme dit précédemment je vous conseille d'écouter Lemniscate si vous voulez vous imprégner de l'ambiance.

Bonne lecture !


Disclaimer : Voltron Legendary Defenders appartient à Dreamworks. Les paroles et le titre sont tirés de l'album Skeletons de Crywolf.


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« Lemniscate (The Place Between Sleeping And Awake) »

« Are you found here in the silence?

(I'm standing here)

Am I sleeping or awake?

(I call your name)

Like a song beneath the violence

(You cut right through)

You are asking me to stay »


X


Dans ses rêves, il y avait toujours quelqu'un d'autre.

Un souvenir, un fantôme. Il arrivait qu'il ait un visage ; la plupart du temps, il s'agissait d'un miroir dans lequel il contemplait ses propres cicatrices, les blessures dont il n'avait pas forcément conscience. Alors il ramassait les fragments de son être, recollait inlassablement les morceaux de son cœur, les soudait entre eux pour qu'il soit encore plus solide, plus inaccessible.

Et puis les visages avaient fini par devenir ceux de personnes qu'il aimait – qu'il n'aurait jamais pensé pouvoir aimer. Des visages inquiets, d'autres souriants. Les sourires dans ses rêves étaient plus étincelants que les siens, plus brûlants qu'un millier d'étoiles ; parfois, ils brillaient même si forts qu'il lui arrivait de fermer les yeux, et tout ne devenait que ténèbres, froides, profondes, insidieuses.

Soudainement, la chaleur se faisait presque palpable, réelle, douloureuse. Alors Keith étouffait, se noyait dans un océan sans fond et sous un ciel infini ; il brûlait vif et en silence, flottait entre l'éveil et le rêve, s'empêtrait dans une léthargie sans fin. Il se consumait dans un vide infini, se débattait et s'accrochait désespérément à la vie.

« Keith. »

Jusqu'à ce qu'une voix, unique et lumineuse ne parvienne à percer ses ténèbres pour l'atteindre, l'entourer, le bercer. Le toucher. Ne plus le lâcher. Le transpercer. Le poignarder.

En plein cœur.


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Keith avait été abandonné toute sa vie.

Par sa mère, d'abord, dont il ne gardait aucun souvenir. Son père, ensuite, à un âge où l'on ne disait pas tout à des enfants pourtant assez âgés pour comprendre certaines choses en lisant entre les lignes. Ceux qui s'étaient occupé de lui lui avaient dit que son père était un explorateur, un aventurier, qu'il était à la recherche de quelque chose, d'un ailleurs ; tout ce que Keith avait retenu de tout ça, c'est que son père était un jour parti et qu'il l'avait laissé derrière lui pour ne plus jamais revenir.

Et depuis, c'est tout ce qu'il avait connu. D'autres personnes, uniques et pourtant semblables à ses yeux, qui avaient fait une brève apparition dans sa vie avant de disparaître aussi simplement et soudainement qu'elles y étaient entrées. À force, il s'était dit qu'il finirait par s'y habituer ; il avait bien vécu jusque là, alors pourquoi est-ce que ça devait devenir plus difficile ? Au début, il gardait l'espoir que son père reviendrait le chercher. Il rêvait parfois de sa mère, lui inventait un visage, une voix, une chaleur et une odeur, une personnalité qu'elle serait la seule à avoir – parce que c'était sa mère, la sienne à lui, et pas une autre personne de passage, un autre parent de substitution qui finira fatalement par l'abandonner à son tour, parce que c'est ce que tout le monde finissait par faire un jour ou l'autre. Il finit par arrêter de le faire, avait grandi, s'était cru indestructible.

Et puis il y avait eu Shiro.

La façon dont Shiro était entré dans la vie de Keith fut différente. Sa vie lui semblait plus compliquée à l'époque, plus sombre, sans doute à cause d'une passe particulièrement pénible où s'était dressé contre le monde entier – il ne savait pas, ne savait plus, parce qu'il avait fini par ne plus faire la différence entre un jour et un autre, une personne ou une autre, une règle ou une autre. Il vivait au jour le jour, avait appris à se défendre, à se protéger des autres. Keith avait fait de son cœur une forteresse, et toutes ces années où il n'avait été qu'un vagabond dans un monde qui le rejetait sans cesse avaient fait de lui un loup solitaire, le réceptacle d'une colère silencieuse, d'une rage qui n'avait besoin que d'une étincelle pour exploser.

Shiro avait été cette étincelle, sous toutes les formes possibles ; mais pas l'étincelle à laquelle Keith s'attendait. Shiro avait été une explosion à sa manière, pourtant ; il avait fait trembler les murs dont il s'était entouré, franchi la barrière qu'il avait construite après tant d'années. Il s'était frayé un chemin jusque là où personne n'avait réussi à l'atteindre auparavant, sans brusquerie, avec la douceur et la force silencieuse qui lui étaient propres. Il l'avait apprivoisé, peut-être, lui avait ouvert les yeux, sûrement. Il l'avait guidé, lentement, avec méthode, sans jamais abandonner.

Et Keith avait commencé à voir le monde sous un nouveau jour. Parce qu'il n'était plus seul.

La vie lui avait semblé moins sombre, pendant un temps. Il s'était mis à penser à ses parents avec moins d'amertume, moins de colère ; juste une avec une étrange tristesse, presque douce, sereine. Shiro lui avait appris à accepter les choses telles qu'elles étaient, à les observer, les comprendre pour réagir en fonction ; et il faut dire que Keith était particulièrement réceptif lorsqu'il s'agissait de ressentis. Peut-être avait-il enfermé son cœur trop longtemps, peut-être avait-il oublié ce que ça faisait d'interagir avec le monde ; toujours est-il qu'il ressentait au centuple ce que n'importe qui vivrait comme quelque chose de banal. Il vivait avec un brasier furieux en lui, qu'il devait constamment brider pour garder le contrôle de ses émotions ; et avec Shiro, il avait fini par croire qu'il pourrait y arriver. Il avait fini par croire qu'il pourrait être autre chose que Keith, ce garçon solitaire à qui le monde entier avait tourné le dos, ce garçon qui avait été abandonné dès sa naissance, qui n'avait rien connu d'autre que la solitude.

Mais il y avait des choses sur lesquelles personne n'exerçait aucun contrôle. Il y avait des choses plus fortes que la volonté, plus fortes que la colère de Keith, plus fortes que la confiance de Shiro.

Pendant un bref instant de sa vie, Keith avait effectivement été autre chose. Shiro lui avait montré un chemin qu'il n'aurait jamais emprunté sans lui, lui avait donné la volonté d'avancer, les ailes qui lui manquaient pour enfin s'arracher à sa perpétuelle solitude. Keith était devenu un élève de la Garnison de la galaxie, avant de très vite se tailler la réputation que lui vaudra d'être le meilleur pilote de sa génération. Il était instinctif, impulsif ; et pendant un temps, il lui avait semblé qu'il avait trouvé sa place dans ce monde où il n'avait fait que s'égarer en pensant avancer.

Jusqu'à ce qu'il se perde à nouveau.

Jusqu'à ce que l'univers lui arrache encore la seule chose qui comptait pour lui.

Jusqu'à ce que Shiro ne l'abandonne à son tour, lui aussi.


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Il n'y avait jamais cru.

Les informations avaient beau défiler sous ses yeux, les mots avaient beau se répéter dans son esprit, Keith n'y croyait pas. Shiro ne pouvait pas s'être écrasé sur Kerberos. Pas après tant de préparation, pas alors qu'il n'y avait aucune raison pour qu'une telle chose arrive. Ça aurait put arriver à quelqu'un d'autre, à une équipe d'explorateurs banals, sans intérêt – mais pas à lui.

Pas à Shiro.

Incrédule, il avait regardé les images défiler plusieurs fois, lu et relu les noms des disparus. Son cœur battait douloureusement et au ralenti à chaque fois qu'il voyait son nom à lui ; Takashi Shirogane. Takashi. Shiro. Shiro.

Shiro.

Shiro, qu'il avait vu pour la dernière fois il y avait quelques mois de ça. Shiro, qui l'avait quitté avec un sourire confiant, comme pour lui transmettre son courage et sa tranquillité jusqu'à son retour. Shiro, à qui il avait promis qu'il fera des efforts. Shiro, qu'il s'était promis de suivre, parce que si Keith n'avait pas de père dont il pouvait suivre les traces, d'aîné à prendre comme modèle, il lui restait au moins ça.

Shiro.

Shiro qui avait disparu, qui se trouvait forcément quelque part, là où il ne pouvait pas aller le chercher.

Shiro, que tout le monde voulait faire passer pour mort pour des raisons qu'il ne parvenait pas à comprendre.

Shiro, qui avait promis qu'il sera toujours là pour lui.

Les jours qui suivirent l'annonce de l'incident de Kerberos étaient très flous dans la mémoire de Keith, ses souvenirs entourés d'une brume de doute et de colère. Il avait demandé des réponses, et en retour, on lui avait demandé de garder le silence. Sa colère n'en avait été que plus belle, plus violente ; on lui avait laissé le choix entre suivre le modèle que tous voyaient en Shiro et se taire et celui de continuer à poursuivre des chimères qui ne le conduiront à rien.

Keith avait choisi.

Il était redevenu le garçon abandonné qu'il avait toujours été. Il était redevenu le garçon rebelle et solitaire, celui à qui les règles qu'on leur imposait à tous ne convenait pas ; celui qui refusait de se soumettre et de rester silencieux, celui qui avait préféré vivre un an tout seul plutôt qu'entouré de personnes sans intérêt, sans couleurs, sans saveur, parées de mensonges et de subterfuges avec lesquels on avait essayé de l'étouffer. Il avait craché son venin, laissé le brasier se répandre ; et pendant cette année de solitude et de recherche constante, c'est tout ce qui le définissait.

Une insatiable soif de connaissance et de liberté, qui alimentaient un brasier sur lequel il n'avait plus aucune emprise.

Keith avait pris le temps d'affûter son esprit, s'était mentalement et physiquement endurci. Les jours défilaient sans qu'il ne s'en rende compte ; et puis une nuit, une lueur avait percé l'horizon sombre. Une étincelle, encore.

Shiro était revenu. Et une fois encore, sa vie en avait été totalement bouleversée.


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Ce que Keith préférait le plus après un combat, c'était l'état dans lequel il se trouvait après avoir tout donné.

Il lui arrivait de rester allongé par terre de longues minutes, incapable de faire quoi que ce soit d'autre que reprendre son souffle. Et c'était pénible, et c'était douloureux, ses poumons et ses muscles étaient en feu et il ne pouvait penser à rien d'autre ; mais il était là. Il ressentait chaque fibre de son être, chaque respiration, la chaleur palpable qui se dégageait de son corps, chaque battement de son cœur.

Et là, allongé dans le silence, son esprit coincé entre un océan d'étoiles et le sol froid et dur sur lequel il reposait, Keith existait. Peu importe la douleur, le silence et la solitude avec laquelle il se protégeait. Peu importe qu'il ne soit qu'un amas de tissus brûlants, le produit d'atomes s'entrechoquant constamment. Sa colère ne l'avait jamais quitté, elle ; et bien qu'elle soit désormais silencieuse et muselée, il la sentait dans chaque fibre de son être, profondément ancrée jusque dans ses os, ses serres plantées dans son cœur. Elle était toujours là, et parfois, il se disait que si il était là, c'était probablement grâce à elle.

Keith existait ; les yeux fermés, le cœur ouvert.

Il existait.


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« Keith ? Allura veut nous voir. Tu viens ? »

Keith ouvrit les yeux et laissa l'air qui emplissait ses poumons s'en échapper totalement. Ses muscles étaient encore douloureux après l'entraînement qu'il venait de leur infliger, son corps brûlait toujours, mais la voix dans sa tête n'était plus la même. Moins forte, moins douloureuse, moins en colère ; mais plus triste, peut-être.

Les dernières bribes du rêve dans lequel il était plongé s'évaporèrent doucement et son regard chercha l'ancre à laquelle s'accrocher pour garder pied avec la réalité. Les yeux sombres de Keith effleurèrent le casque du Paladin noir avant de s'en détourner pour croiser le regard de Lance. L'autre ne le lâchait pas des yeux, attentif ; et tous deux savaient déjà que la question silencieuse dans son regard ne trouvera pas de réponse de sa part.

Il avait encore fait le même rêve.

Keith pouvait presque sentir la main de Shiro sur son épaule en puisant le courage nécessaire pour se relever. Chaque mouvement était lourd, chargé de douleur. La flamme qui brûlait en lui était toujours là, présente, inexpugnable, mais moins forte, plus diffuse.

Il leva les yeux vers Lance et aperçut une pâle copie de ce qu'avait pu être Shiro dans son regard. Il lui fallut un moment pour rassembler ses esprits dans un flot de pensées qui ne s'arrêtait jamais et être certain qu'il était bel et bien réveillé.

« J'arrive. », finit-il enfin par répondre, d'une voix morne qui laisse entrevoir les cendres de ce qui brûlait autrefois en lui.

Lance garda le silence et s'effaça pour le suivre à travers les couloirs. Keith marchait devant, l'échine courbée par le poids qu'il portait désormais sur ses épaules. Ils n'eurent pas besoin de se parler ; la situation n'avait pas vraiment changé, et ils savaient tous les deux que leur vie avait pris un tournant imprévisible et qu'ils ne pouvaient rien faire d'autre qu'avancer en faisant leur possible pour ne pas tomber.

Keith existait.

Mais il y avait quelque chose en lui qui avait arrêté de vivre dès lors qu'on lui avait enlevé la seule famille qu'il lui restait.


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Note de fin :

Oui, je sais, c'est Angst, mais qui aime bien châtie bien comme on dit (a)

Merci pour votre lecture ! Je posterai la suite sans aucun doute dans la semaine, ce sera plus long et avec le Klance qui se met doucement en place. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, les reviews sauvent des vies :)

Bymeha