A/N: Dernier chapitre! J'espère que cette histoire vous aura plu! Merci de l'avoir lue, et n'hésitez pas à laisser une review! ;)
A bientôt!
Chapitre 22
Lorsque Hideyuki embarqua à bord de l'avion qui allait l'emmener loin du Salvador, il s'installa à côté d'un hublot et contempla le paysage centre-américain pour la dernière fois. Il était marqué par son passage dans cette région hospitalière et colorée, mais pas forcément de manière positive. Et le paysage, bien que magnifique, ne lui manquerait pas.
Ses pensées dérivèrent vers ses souvenirs tandis que l'avion prenait de la vitesse et décollait. Trois ans loin du Japon... Trois ans de franche et intense camaraderie partagée avec ses cousins, à se sauver la vie les uns les autres, à se faire aveuglément confiance, à se quereller violemment parfois, à apprendre à effectuer des missions en se coordonnant au point qu'ils pouvaient le faire les yeux fermés et sans paroles...
Trois ans loin du pays natal, loin de la famille aimante et rassurante, loin de la vie de collégien rangée et sécurisée, du moins la plupart du temps. Trois ans à vivre dans l'insécurité et la clandestinité la plus totale, à bouger sans arrêt pour éviter la police et les tueurs à gages à leurs trousses, à se méfier de tout et tout le monde.
Trois ans à apprendre l'espagnol, à parler anglais et même par signes, à apprendre la survie dans la jungle naturelle et urbaine, à trimer pour gagner le moindre dollar américain et à le dépenser avec parcimonie. Trois ans de petits boulots mal payés entre deux missions, de méfiance ou de rejet de la part des autochtones, de sommeil perturbé ou d'insomnies suffocantes.
Trois ans de combats contre le tentaculaire tigre d'argent, jadis puissante organisation, aujourd'hui ruines fumantes. Trois ans de pièges déjoués, d'attaques avortées, de plans élaborés, de blessures subies, la mort frôlée de trop nombreuses fois. Trois ans de cadavres accumulés comme autant de trophées de chasse macabres, de blessés mis hors d'état de nuire, de pantins de l'organisation libérés et rendus à une vie normale, plus ou moins indemnes.
Il repensa en particulier à cette terrible confrontation au Nicaragua. Celle où Rick, le membre du tigre d'argent qu'ils avaient réussi à sauver d'une exécution sommaire, les avait aidés en les conduisant à la base de stockage de drogue la plus importante du cartel dans le pays. Celle où ils avaient détruit la drogue, des tonnes et des tonnes prêtes à être expédiées, en faisant sauter le bâtiment après s'être frayés un chemin jusqu'à la poudre blanche à coups de fusils à pompe. Et celle où Rick était tombé aux mains de l'ennemi en voulant s'enfuir de son côté, au mépris de leurs mises en garde.
Il eut un frisson de remords et de dégoût en repensant à ce que lui avait raconté un paysan ayant entendu la suite de l'affaire. Ils n'avaient pu secourir Rick à temps, car les forces du tigre d'argent, pour une fois efficaces car commandées par Iwagaki en personne, avaient débarqué en masse sitôt la drogue détruite, et les avaient aussitôt mitraillés. Rick était tombé dans leurs griffes, et il avait subi les foudres du cinglé de grand patron.
Le paysan avait les yeux fous de terreur lorsqu'il raconta à Hideyuki, qui luttait pour ne pas s'effondrer, l'écartèlement du traître comme aux pires heures du Moyen-Âge, avec quatre chevaux et des couteaux bien émoussés. Et depuis, le tigre de glace, comme l'appelaient avec révérence et crainte les malfrats et ennemis de tous bords qui l'avaient côtoyé, s'était blindé à toute émotion extérieure. Seule son âme était tourmentée, et seuls ceux qui le connaissaient bien pouvaient le deviner.
Il caressa sa barbe d'un geste pensif. Il l'avait fait tailler à l'aéroport avant d'embarquer, et s'était même offert une bonne coupe de cheveux. Il avait pris une longue et revigorante douche avant de rendre les clés de leur studio, et avait acheté des vêtements neufs dans une boutique duty free de l'aéroport. Il s'était changé dans les toilettes, avait jeté ses fripes dans une poubelle, et repensa à son détour par le front de mer pour se débarrasser de tous leurs vêtements et armes qu'ils ne pouvaient emmener. Les trois tigres avaient été soigneux, et normalement personne ne pourrait remonter jusqu'à eux.
Il s'était assoupi, perdu dans ses pensées douces-amères, lorsque le stewart lui apporta un plateau-repas qui le laissa dubitatif. Il eut un sourire en coin en imaginant la réaction de son cousin Genzo au menu succinct et aux portions infinitésimales, et engloutit la maigre pitance en quelques minutes, essayant de ne pas penser aux délicieux ragoûts bien mijotés et typiquement japonais de sa mère.
Penser à sa mère l'emplissait de bonheur et de regret. Il avait vraiment hâte de la revoir, et regrettait d'avoir dû passer trois ans loin d'elle et de sa famille. Et sa merveilleuse petite sœur... Elle allait sauter de joie, bien sûr, mais il ne serait pas à l'abri d'une bonne claque, voire une massue, plutôt méritée, pour son absence prolongée. Mais lui, au moins, avait écrit pour donner des nouvelles. Donc peut-être échapperait-il au châtiment divin, en fin de compte.
Quand une hôtesse vint débarrasser son plateau avec un sourire aguicheur qui le laissa de marbre, il songea à son père. Il avait hâte de le voir également, et en même temps il redoutait un peu la confrontation. Ryo, bien informé comme il l'était, n'aurait pas manqué de connaître sa nouvelle réputation et les hauts (et bas) faits des trois tigres. Et que dirait le tout-puissant City Hunter au tigre de glace? Et lui, que dirait-il à son respectable nettoyeur de père?
Puis son esprit s'envola vers l'objet de toutes ses pensées. Rumiko avait dû grandir et s'embellir durant ces trois longues, très longues années. Il était amoureux transi, il en était parfaitement conscient, et la distance entre eux, loin de calmer ses sentiments, n'avait fait que les exacerber. Il avait tellement hâte de la revoir, de la serrer dans ses bras, de l'embrasser à en perdre haleine et raison.
Il se força au calme et à la patience. Plus que quelques misérables petites heures le séparaient d'avec sa vie d'avant et d'après. Et il avait envie de l'après. Il savait qu'après trois années d'indépendance absolue il lui serait difficile de retourner chez ses parents et de se plier aux règles familiales, mais il n'aurait pas le choix. Il n'avait que dix-huit ans, n'atteindrait sa majorité que dans deux ans, et ne pouvait pas encore quitter le domicile familial.
Il soupira et se rencogna dans son siège, ignorant son voisin qui ronflait déjà, et jeta un dernier regard aux étoiles qui clignotaient à travers le petit hublot, avant de fermer les yeux. Il était aux aguets, bien entendu, il le serait toujours dorénavant et jusqu'à sa mort, mais il s'assoupit. Personne n'avait d'aura hostile à bord de l'appareil, alors il tâcha de grappiller quelques précieuses minutes de repos.
Quand les roues de l'avion touchèrent le tarmac de l'aéroport Narita de Tokyo, Hideyuki sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Il était enfin rentré au pays. S'il ne se maîtrisait pas aussi bien, il aurait pu verser quelques larmes d'émotion, mais son visage resta impassible. Il attrapa son sac, qui contenait son fidèle Smith et Wesson, dans le compartiment au-dessus de sa tête, et sortit de l'avion, ignorant la main tendue de l'hôtesse persistante qui abritait un bout de papier contenant certainement des coordonnées téléphoniques dont il n'avait que faire.
Après les formalités administratives vite expédiées et le carrousel à bagages qu'il ignora, il émergea dans le terminal et repéra immédiatement Genzo qui l'attendait près d'un stand de boissons chaudes. Il se dirigeait vers lui lorsqu'une aura terriblement familière l'atteignit de plein fouet et le fit faire volte-face.
Il était encore à une trentaine de mètres, mais Hideyuki reconnut la démarche souple et la veste élimée dont il refusait obstinément de se séparer, celle qui dissimulait si bien son Python. Il fut quelque peu frappé par les tempes grises et les cheveux poivre et sel de son père, mais le visage n'avait pas changé, et le regard restait perçant et pétillant. Il vit le nettoyeur s'arrêter à trois mètres de lui, le contempler avidemment et s'attarder avec scepticisme sur sa barbe et avec compassion sur sa cicatrice, avant de retrouver sa neutralité coutumière.
_ Bienvenue au Japon, Hide, dit tranquillement Ryo, comme s'ils s'étaient vus la semaine précédente.
Alors le jeune homme réalisa l'exploit de surprendre son père en plus de lui-même, et se précipita dans les bras de Ryo qui l'enlaça étroitement, la surprise passée.
_ Je suis tellement heureux de te voir, Papa, murmura-t-il, la voix un peu tremblante.
_ Moi aussi, mon fils, lui répondit Ryo sur le même ton. Tu nous as manqué.
_ Comment savais-tu? s'enquit Hideyuki en s'écartant à regret.
_ Le téléphone arabe, sourit le nettoyeur avec un air espiègle. Le réceptionniste de l'hôtel où Genzo et Masao ont pris une chambre a entendu l'horaire d'arrivée de ton avion, or c'est le cousin de la belle-sœur d'un de mes indics, et je lui ai déjà sauvé la mise par le passé. Il me devait un service, il a payé sa dette.
_ Le monde est petit, commenta son fils en souriant à son tour et en faisant signe à un Genzo indécis de s'approcher.
_ Hide, dit Ryo d'un ton soudain urgent, il faut qu'on parle, tous les deux. De l'avenir.
_ Très bien, Papa, je viens avec toi.
_ Bonjour, Genzo, dit le nettoyeur en saluant son neveu qui le dominait de deux têtes.
_ Bonjour, oncle Ryo, répondit le géant avec amabilité. J'espère que tu vas bien.
_ Très bien, merci, à part la vieillesse.
_ La vieillesse, c'est dans la tête, affirma Hideyuki alors que Genzo souriait. La jeunesse aussi, d'ailleurs.
_ C'est pour ça que je suis un jeune quinquagénaire de vingt ans!
_ Bon anniversaire, Papa, avec quelques jours de retard.
_ Merci, mon fils, dit Ryo avec un soupçon d'émotion dans la voix.
Hideyuki déchiffra sans difficulté les pensées de son père à son regard exceptionnellement transparent. Il était étonné d'être encore en vie et d'avoir soufflé ses cinquante bougies avec la vie dangereuse qu'il menait, et reconnaissant du bonheur qu'il avait pu vivre et vivait toujours.
_ Gen, annonça doucement le jeune homme, ignorant superbement les grommellements agacés du flot de voyageurs qui devait les contourner pour se diriger vers la sortie, je vais monter avec Papa, si ça ne te dérange pas.
_ Du tout, s'empressa de répondre le fils Ijuin. Rendez-vous au Cat's, ajouta-t-il simplement.
_ Merci, Gen.
_ Vous avez tellement mûri, tous les deux, dit pensivement Ryo, et Masao certainement également.
_ Oui, c'est vrai, concéda Hideyuki tandis qu'ils se mettaient en route vers le parking.
Ils ne dirent plus rien jusqu'à l'abri réconfortant de la vieille Mini dont son père ne souhaitait apparemment pas se séparer, et Ryo ne reprit la parole que lorsqu'il déboîta de la file de voitures pour foncer sur le bas-côté en direction du centre-ville dans un concert de klaxons.
_ Tu m'as vraiment manqué ces trois dernières années, Hide, avoua-t-il avec une émotion peu habituelle dans sa voix. Pas seulement parce que mon fils était loin de sa famille et risquait tous les jours sa vie, mais parce que j'ai pris conscience de ton absence. Je me suis rendu compte qu'inconsciemment je comptais sur toi pour assurer mes arrières en mission, même lorsque tu n'étais pas censé le faire, malgré mon entêtement à vouloir te laisser hors du milieu, et j'ai enfin compris. J'ai compris que je me suis conduit comme un imbécile, et que j'aurais dû écouter ta mère depuis longtemps. Kaori m'avait dit il y a quelques années maintenant que tu prendrais sa place, et j'ai compris que c'était la juste continuité des choses. Tu es un homme, Hide, et tu sais te défendre et défendre ta famille. Tu es le tigre de glace du trio des trois tigres, et à vous trois vous avez détruit le tigre d'argent.
Hideyuki décela la note de fierté dans la voix du nettoyeur, et il en fut transporté de joie. Pour lui, c'était la reconnaissance suprême. Le grand Ryo Saeba était fier de lui! Il pouvait marcher sur l'eau.
_ Alors je te le redemande humblement: voudrais-tu me faire l'honneur de prendre la place de ta mère et devenir mon partenaire pour un petit moment?
_ C'est moi qui en serai plus qu'honoré, dit-il après un raclement de gorge. Mais que veux-tu dire par "un petit moment"?
_ Six mois ou un an maximum, dit simplement Ryo, reportant son attention sur la route à présent dégagée et la conduite. Je veux prendre ma retraite, Hide. Et Masao ne va pas attendre des années. Je voudrais juste te montrer le fonctionnement de City Hunter et surtout ses subtilités, et peut-être t'apprendre quelques ficelles du métier que tu ignorerais encore. Ensuite je me retirerai et Masao prendra ma place, s'il est toujours d'accord, bien sûr.
_ Il est plus que partant, lui assura Hideyuki avec un pincement de nostalgie au cœur. Ça me fait très bizarre de me dire que tu vas te retirer, Papa. Pour moi, City Hunter, c'est surtout toi.
_ Une page se tourne, dit tranquillement le nettoyeur alors que les tours de Shinjuku se rapprochaient, faisant battre le cœur du jeune homme un peu plus vite. Il est temps, Hide. C'est à ton tour de prendre la relève, et je sais qu'elle est bien assurée. J'ai trop joué avec la Mort et avec les nerfs de ta mère.
_ Je ne jouerai pas comme toi, lui rétorqua son fils avec amusement. Moi au moins je ne cache pas que j'aime Rumiko et que je veux faire ma vie avec elle tant qu'elle durera.
_ Le secret de la longévité dans le milieu, c'est d'avoir un partenaire de toute confiance. J'ai eu l'immense chance et le privilège d'avoir Kaori à mes côtés pendant toutes ces années, grâce à ton oncle Maki. Et si je suis en vie aujourd'hui, si j'ai la chance d'être marié à la plus merveilleuse femme du monde et d'avoir deux merveilleux enfants, c'est uniquement grâce à elle. Elle est et a toujours été la partenaire idéale pour moi. Alors j'espère juste que Masao sera un bon partenaire pour toi, digne de confiance.
_ Il l'est déjà, Papa, dit Hideyuki, un peu ému. C'est pour lui que j'ai hérité de la cicatrice.
_ Oui, il nous l'a raconté avant que je ne parte du Cat's, dit Ryo, à la fois songeur et admiratif. Il t'en est très reconnaissant, d'ailleurs, et il peut l'être. Je crois que même Kazue ne pourra rien faire pour ça.
_ Je m'en fiche, tant que vous m'acceptez comme ça.
_ Vu le nombre de balafres que tes oncles et moi avons sur le corps, ce serait le comble! Ne t'inquiète pas pour nous, Hide. C'est à ta sœur et à ta chérie que tu penses, n'est-ce pas?
_ Oui, dit-il succinctement.
_ Elles s'y feront, lui affirma sereinement Ryo, apaisant un peu les craintes du jeune homme. Ce n'est pas si terrible, après tout. Par contre, la barbe, je ne dis pas.
_ Masa t'a raconté pour ça aussi?
_ Oui, et je respecte ton choix, Hide. Mais tu as l'air tellement sérieux, comme ça! Et on dirait que tu as déjà trente ans!
_ Dans ma tête, peut-être, admit le jeune homme, impatient en voyant son père s'engager dans la rue du Cat's.
_ Ne vieillis pas trop vite, mon fils, lui conseilla plus sérieusement le nettoyeur. Profite de la vie, car elle peut s'arrêter à tout moment, tu le sais à présent.
_ Oui, Papa, promis.
Ryo se gara devant le café où toute la famille des nettoyeurs les attendaient, et retint Hideyuki avant qu'il ne puisse ouvrir sa portière.
_ Une dernière chose, Hide. Tu vas habiter au deuxième étage de l'immeuble, si tu le souhaites.
_ Quoi? s'étonna ce dernier, interloqué. Pourquoi?
_ Loin de moi l'idée de te chasser, expliqua son père d'un air triste. Mais tu reviens de trois ans de vie trépidante entre nettoyeurs parfaitement libres de leurs mouvements, et tu as certainement envie de conserver un peu d'indépendance. Même si tu es encore mineur aux yeux de la loi, tu ne l'es plus dans les faits. Alors, Kaori et moi avons pensé que tu pourrais emménager dans l'appartement meublé du deuxième. Ainsi, techniquement tu seras toujours à la même adresse que nous et sous notre responsabilité, mais en pratique tu pourras mener ta vie comme tu l'entendras. Qu'en penses-tu?
Hideyuki, complètement pris par surprise, ne put proférer le moindre son pendant quelques secondes. Ses parents lui offraient la liberté qu'il avait redouté de perdre, ce dont il leur était profondément reconnaissant.
_ Merci, Papa, finit-il par dire, empli de gratitude et de soulagement. C'est très prévenant de votre part.
_ De rien, mon fils, dit Ryo en s'extirpant de sa Mini, et le jeune homme l'imitant. Et puis comme ça, trois étages nous sépareront quand toi et Rumiko passerez aux choses sérieuses. Je préfère.
Hideyuki sentit le rouge lui monter violemment aux joues à ces mots, et retint sa réplique cinglante. Rumiko était trop jeune, et lui pas prêt, malgré tous ses désirs. Il fallait d'abord qu'elle l'accepte tel qu'il était devenu. Une soudaine boule d'angoisse lui tordit l'estomac, et son père dut le sentir car il vint poser sa main sur son épaule, disant seulement:
_ Elles t'attendent, Hide. Ta mère, ta sœur et surtout Rumiko. Personne ne te rejettera.
Le fils serra brièvement le bras du père pour le remercier, inspira à fond puis poussa la porte du Cat's, flanqué du nettoyeur. Il eut à peine le temps de noter la présence de tous les membres de sa famille, Genzo compris, qu'un grand cri résonna à ses oreilles et que sa mère se précipita et l'enlaça à l'étouffer.
_ Hide!
Kaori sanglotait dans son cou, répétant comme une litanie "Tu es revenu, tu es revenu." Il ne dit rien, se contentant de l'étreindre avec tout l'amour qu'il ressentait pour elle, et finalement elle s'écarta au bout de longues minutes, le contemplant avec bonheur et des larmes plein les yeux.
_ Joyeux anniversaire, Maman, dit-il doucement en déposant un tendre baiser sur sa joue.
Il la dépassait d'une tête, mais elle ne parut pas s'en formaliser. Elle se contenta de l'embrasser sur la joue également en lui soufflant:
_ Merci, mon grand. Je suis si heureuse! C'est le plus beau cadeau que tu puisses m'offrir, ton retour parmi nous.
Il lui sourit et Kaori le câlina encore quelques secondes, puis s'écarta à regret.
_ Tout le monde veut te saluer.
Il se tourna vers le reste des membres de l'assemblée, et tous l'accueillirent avec des mots chaleureux qui le remuèrent au plus profond de lui-même.
_ Bienvenue, Hide, dit Mick, étreignant fièrement un Masao assez gêné. Bon retour parmi nous.
_ C'est tellement bien que vous soyez rentrés, souffla Miki, en larmes et observant son fils des pieds à la tête, ce qui faisait rougir Genzo, Falcon se contentant de le saluer d'un sourire.
_ Je vais voir si je peux arranger ta cicatrice, promit Kazue avec un grand sourire, portant la petite Mitsuki qui babillait joyeusement avant de courir dans toute la pièce. Passe à la clinique demain.
_ Bon retour au Japon, Hide, dit Saeko, flanquée d'une Reika un peu embarrassée mais souriant bravement.
Et enfin il arriva devant Natsumi, qui le regardait d'un œil noir. Elle lui dit après quelques secondes:
_ Alors comme ça tu pensais qu'on n'accepterait pas ton apparence, grand frère? Tu as de la chance que j'aie laissé mes massues à la maison, sinon tu t'en serais pris une belle, idiot!
Et elle l'enlaça et lui chuchota:
_ Je suis si contente de te voir, Hide. Merci d'être revenu.
_ Je sens que tu n'as pas perdu de temps avec Masa, devina-t-il à son sourire rayonnant. Pas de bêtises, hein? Je ne veux pas le tuer tout de suite.
_ Tais-toi donc, rit-elle, les yeux pétillants.
Ils s'écartèrent l'un de l'autre en échangeant un sourire complice puis, tandis que Natsumi rejoignait Masao qui la prit dans ses bras, il se tourna vers Rumiko, la plus discrète de tous, la plus belle aussi. Son cœur rata un battement en la détaillant pour la première fois depuis trois ans. Elle était quasiment aussi grande que lui, avait des formes généreuses rehaussées par des habits très bien ajustés, et un regard à le faire se pâmer.
Il dut contrôler son violent désir, ne voulant pas tomber aussi bas que son obsédé de père en montrant son mokkori à tous, mais il avait envie d'elle. Il l'aimait comme un dingue. Et elle...?
Elle l'observait toujours, les traits affichant une expression neutre, et il eut peur. Ses sentiments vis-à-vis de lui avaient-ils changé? Disparu? Son apparence la rebutait-elle?
Et finalement, après une éternité, elle s'approcha de lui et tendit la main. Il craignit une gifle, mais elle la posa doucement sur sa joue et, très tendrement, passa ses doigts sur sa cicatrice. Ses yeux s'adoucirent et se mirent à briller tandis qu'il n'en menait pas large, des nœuds se formant dans son ventre, puis elle se pencha et l'embrassa. D'abord sur la cicatrice, puis sur la barbe de chaque joue, et enfin sur ses lèvres.
En apnée, il finit par lui rendre son baiser, et laissa le bonheur et le soulagement envahir ses sens et l'enivrer.
_ Bonjour, Hide, murmura-t-elle en s'écartant très légèrement avant de l'embrasser de nouveau.
_ Je t'aime, Rumi, souffla-t-il, les larmes lui piquant les yeux. Je suis désolé d'avoir été si long.
_ On a toute la vie devant nous, maintenant. Je t'aime, Hide.
Et sous les applaudissements de l'assemblée attendrie, ils s'enlacèrent dans le plus merveilleux câlin dont Hideyuki ait jamais pu rêver. La vie commençait.
FIN