Peter et le Choixpeau magique

Parce que, parfois, même le plus magique des chapeaux se prend la tête…

« Pettigrow, Peter ! »

La voix du Professeur McGonagall retentit dans toute la salle. Minerva McGonagall était une femme d'une quarantaine d'années, que le célibat et l'absence de grossesse avaient remarquablement conservée. Elle était toute mince et n'avait pas une ride. Malgré un style austère derrière ses petites lunettes et son grand chapeau de sorcière, elle dégageait un charme qui avait touché le jeune Peter dès qu'il l'avait vue. Lui qui, à onze ans, était petit, gros et poltron, voyant cette dame altière leur expliquer qu'ils allaient être répartis dans l'une des quatre maisons de Poudlard, qu'elle-même était la directrice de la maison de Gryffondor, avait été subjugué, et il avait décidé qu'il irait dans sa maison à elle.

A présent, elle l'avait appelé. A présent, le Choixpeau allait choisir. C'était son heure de vérité, son quart d'heure de célébrité, il fallait y aller.

« Pettigrow, Peter ! », répéta McGonagall.

Euh…

Allez savoir pourquoi, les jambes de Peter refusèrent d'obéir. Transi par le trac, il se mit à trembler.

« Allez, vas-y ! », lui souffla sa conscience, celle qui avait l'apparence d'un gamin joufflu aux cheveux blonds. « Sinon, elle va répéter ton nom… »

« Mais j'aime l'entendre dire mon nom ! », répondit l'autre partie de sa conscience, celle qui avait une face de rat.

« Arrête de te trouver des excuses et vas-y ! »

Mais il ressentait l'envie de disparaître dans un trou.

« Bordel, Peter, tout le monde t'attend, tu es en train de te taper la honte, là ! »

« Oui, oui, c'est vrai… »

Peter, enfin, s'avança. Regardant McGonagall, tellement sexy sous sa robe de chambre, il s'assit sur le tabouret, manquant de faire tomber ce dernier. Le professeur posa le choixpeau sur sa tête, et à ce moment-là, tout s'obscurcit.

Peter était dans les ténèbres. Une voix d'outre-tombe se mit alors à lui faire part de ses réflexions : « Hum… Je vois qu'on a à faire à une personnalité complexe… »

« Complexée, surtout. », avoua Peter.

« Oui… Je le sens… Où je vais bien pouvoir te mettre, toi ? »

« Euh… Si je puis me permettre… »

« Oui ? »

« J'aimerais bien… Euh… Non. Non, rien, oubliez ce que je viens de dire ! »

« Ah ? Tu as peur de t'exprimer ? Mais tu sais, la sincérité, parfois, ça aide. »

« Vraiment ? »

« Oui. Car là, je t'avoue que je ne sais pas où te caser ! »

« … »

« Hum… Voyons… Tu ne m'as pas l'air d'être une lumière, donc, on va exclure Serdaigle… »

« Ok. »

« Et il approuve, ce crétin ! Bon, passons ! Alors… Tu m'as l'air bien gras, mais je ne te vois pas à Pouffsouffle ! »

« Manger c'est sympa… », admit Peter.

« Oui mais ça se mérite. Les Pouffsouffle sont loyaux, et d'après ce que je lis en toi, la loyauté, ça n'a pas l'air d'être ton fort ! »

« Si vous parlez de ce qui s'est passé au jardin d'enfants, je n'avais que cinq ans ! »

« Oh, s'il n'y avait eu que ça ! Tu as changé de meilleur copain parce qu'il t'avait vexé, tu passes ton temps à te cacher quand ta mère t'appelle pour l'aider à faire le ménage, tu as même dissimulé sous ton matelas l'argent que tu lui as piqué… »

« Mince, l'argent ! Je l'ai oublié à la maison ! »

Peter était atterré : avec quoi allait-il pouvoir acheter les bonbons de Bertie Crochue ?

Le Choixpeau, quant à lui, continuait ses réflexions : « Quoique, maintenant que j'y pense, tu m'as l'air assez opportuniste, peut-être même rusé, mais tu manques d'ambition, par conséquent j'hésite à t'envoyer à Serpentard… »

« Moui… Mais pourquoi pas plutôt Gryffondor ? »

Ça y est, c'était sorti. Il avait osé le dire.

« Gryffondor ? »

Le Choixpeau eut un fou rire.

« Ben quoi ? Qu'est-ce qu'il y a de drôle ? »

« Peter… C'est bien ton nom, hein ? Peter… Gryffondor, c'est pour les courageux, pas pour ceux qui ont tellement le trac de se montrer en public qu'il faut les appeler deux fois ! »

« Mais-heu ! »

« T'aurais-je vexé ? »

« … »

« Pourtant, je ne dis que la vérité. »

« La vérité d'un morceau de tissu, merci bien ! »

« Ho-ho, mais je vois qu'on fait l'impertinent ! Alors comme ça, le jeune monsieur a la fierté des lions ? »

« Oui ! »

Peter était content de s'entendre dire cela. Tellement fier qu'il n'avait pas relevé l'ironie du chapeau.

« Non mais, arrête de rêver ! », lui dit le Choixpeau. « Tu es lâche, ça se voit à des lieues ! Tu as une opinion de toi-même totalement faussée, mon petit Peter, c'est pour ça que je ne sais pas où te mettre ! »

Même les morceaux de tissu ont leur susceptibilité.

« Euh… Si vous ne trouvez pas de maison, ça veut dire que je vais finir comme le concierge ? »

« Non, on va ta trouver un clan, on n'est pas dans Divergente. Bon, je sèche ! Allez, puisque tu as l'air intéressé par Gryffondor, ce qui, entre nous, ne te correspond pas du tout, je te laisse exposer tes arguments ! »

« Ben… En vrai, je suis amoureux du Professeur McGonagall. »

« C'est quoi cet argument ? Elle a l'âge d'être ta mère ! »

« Mais-heu ! »

« Sérieusement, si tu n'as rien de mieux à me servir, je t'envoie à Serdaigle, idiot comme tu es, tu vas passer sept années à te faire victimiser ! »

« Mais vous êtes horrible, en fait ! »

« J'ai le pouvoir, j'en profite. Après tout, je ne suis qu'un humble chapeau, l'heure du choix, c'est mon moment de l'année. Il faut bien que je compense ma triste vie de chapeau en martyrisant deux ou trois gamins de temps en temps ! »

« Mais pourquoi vous ne m'envoyez pas où je veux aller sans vous poser de question ? »

« Parce que je ne te vois pas du tout à Gryffondor. Désolé, gamin, mais c'est la réalité : tu as peur de ton ombre ! »

Peter péta de dépit. C'était plus fort que lui, il était un trouillard, mais se l'entendre dire, et surtout entendre que cela l'empêcherait d'aller où il le voulait, le démoralisa profondément.

« Mais… Moi, je veux aller dans la maison de Godric Gryffondor ! Justement parce que je ne suis pas courageux, et j'admire ceux qui le sont. Je voudrais tellement devenir comme eux ! »

« Hum ? »

Enfin un argument qui lui parut sincère ! Le Choixpeau en fut touché.

« Vous savez, ajouta Peter, qui parfois en faisait trop, dans le train, il y avait ces deux garçons… Eh bien, vous savez ce qu'ils ont fait ? »

« Non, mais vu que tu es lancé, tu vas me le dire… », ironisa le couvre-chef.

« Ils ont ouvert la fenêtre et tendu leur bras à l'extérieur, alors que c'était interdit ! »

Le Choixpeau eut envie de répondre : arrête-toi là, gamin, je ne suis pas psy non plus ! Mais c'était un chapeau poli, quoique cruel, et il se contenta d'un simple : « Ah ? »

« Et même que l'un d'eux à carrément passé sa tête ! Ho, ho, ho ! Vous auriez vu ça ! Ça lui a ébouriffé les cheveux, il avait la classe ! »

« Mouais… Et si le train d'en face était passé, ça l'aurait décapité ! Une classe royale, en effet… Et il s'appelait comment, ce petit con ? »

« James Potter. »

« Encore un qui va mourir jeune ! »

« Hé ! Pourquoi vous dites ça ? »

« Les petits cons, à force de faire des trucs imprudents, ça a des accidents, et ça reste sur le carreau ! »

« Mais vous êtes méchant, vous, en fait ! D'abord, James il a la classe, et Sirius aussi ! Et vous avez envoyé Sirius Black à Gryffondor, alors, si j'y vais aussi, je pourrais devenir ami avec eux ! »

« Bon… Ma foi, je ne vais pas passer ma soirée avec toi, alors si tu tiens à aller à Gryffondor pour séduire la McGonagall, ou James Potter, ou Sirius Black, je ne vais pas t'empêcher de vivre ta vie ! Après tout, je ne suis qu'un chapeau ! Allez, vendu : GRYFFONDOR ! »

La lumière aveugla Peter Pettigrow. La première chose qu'il distingua fut le Professeur McGonagall, qui lui souriait avec bienveillance. Il se sentit heureux, tandis qu'il s'avançait vers la table des Gryffondor qui l'acclamaient. De magnifiques années s'annonçaient devant lui, et il eut le sentiment qu'il aurait une très belle vie, longue et prospère.

Derrière lui, son délicieux, la voix du Professeur McGonagall retentit.

« Potter, James ! »