Chapitre 2

Je respirais profondément. Y a des moments comme ça vous savez, où le premier mot qui nous vient à l'esprit ressemble à quelque chose près, à ça :

« Putain … »

Ou pas. Non, ce n'est pas que je n'aime pas être vulgaire, disons plutôt que c'est un manque d'habitude. De l'angle du couloir, successivement, quatre personnes surgirent. Trois garçons, une fille. Chemises blanches, normal. Pantalons noirs, normal. Cravates rouges comme moi, … . Misère, des Gryffindors. S'il y a bien une chose que je déteste, c'est être redevable à quelqu'un. A un groupe n'en parlons pas, alors ajoutez à cela un groupe de Gryffindors, j'aurais presque préféré me faire écraser par les gros lourdauds de tout à l'heure.

Quoique…

Ils arrivent enfin à ma hauteur, toujours hilares. Et là, le choc. Ce n'était pas trois garçons et une fille, mais deux garçons et deux filles. Et quelle fille ! Les cheveux auburn, de grands yeux verts et pour sublimer le tout, un regard de biche. Le plus grand des deux garçons, un blond dégingandé à l'air jovial, pose d'autorité une main sur mon épaule et s'adresse à moi de la même manière qu'il se serait adressé à un amis de toujours en disant :

_T'as vu leur tête !

Fut-ce son rire sot, son air débile ou un subtil mélange de ces deux facteurs qui me conduisit à reculer, faisant lourdement tomber son bras dans le vide ? Sûrement. Toujours est-il que plus la journée avançait, plus ma capacité de résistance à la frustration s'amenuisait et plus je sentais une colère monumentale poindre sous mon calme apparent.

_ Oui, répondis-je, plus sèchement que je ne l'eus voulu.

Je m'éclaircis brièvement la voix.

_M-merci.

Il avait eu du mal à sortir, mais voilà, c'était fait. C'est donc satisfait et sans plus un mot que je me retournai et m'apprêtai à aller chercher mes affaires qui devaient encore se trouver au pied de mon lit aux draps rouge et or.

_Hé !

La fille aux cheveux court m'interpela et me rejoignit en quelques enjambés. Arrivée à ma hauteur, elle fronça les sourcils et me lança :

_Tu comptes vraiment t'en tirer comme ça ? Un petit merci, et voilà, Monsieur s'en va ?

Il y a des moments comme ça où clairement émergent un avant et un après. De ces moments de notre vie où notre vie bascule. Où ce qui devait advenir passe au conditionnel, remplacé impérieusement par un tout nouveau panel de possibilités. Adrian était en train de vivre un de ces moments. En laissant s'échapper sa colère, sa rage refoulée, sa tristesse informulée, à cet instant, son avenir s'était transformé. Mais cela ne s'est pas encore passé. Pas tout à fait.